Rails
Les travaux en cours au coeur d’Annemasse chamboulent la ville. Le nouveau tronçon du tram 17, long de 1,3 kilomètre, irriguera le centre, qui se piétonnise.
La ville d’Annemasse est en train de changer profondément, marquant même des points comparativement à Genève, qui peine à créer des espaces piétons. Le fer de lance de cette mutation est le prolongement sur 1,3 kilomètre du tramway. En 2026, la ligne 17, gérée par les Transports publics genevois, traversera la commune sur trois stations supplémentaires, desservant le coeur urbain de l’agglomération jusqu’au quartier du Perrier. Cette opération est spectaculaire, car elle se déroule au coeur même d’Annemasse, où places et rues se sont transformées en chantier à ciel ouvert. À la fin, deux tiers du trajet auront lieu en site propre. Ces travaux s’accompagnent d’un vaste projet de piétonisation du centre, mené par la commune. Parmi les lieux concernés : les places Deffaugt et Jean-Jacques-Rousseau, les rues des Vétérans, du Commerce, l’avenue Pasteur. Sans oublier les zones de rencontre sur l’avenue de la Gare (entre la place de la Poste et la rue du Mont-blanc) et sur la rue du Chablais (entre la place Deffaugt et la rue Magnin). Le tout, livrable fin 2025. En suivant le tracé de cette ligne, on découvre à gauche et à droite des rails, des ruelles sans trottoirs, signe de l’arrivée de réelles rues piétonnes. Au total, le projet comprend 18 400 m² de surfaces refaites, aires piétonnes et zones de rencontre confondues, selon Annemasse Agglo. À Carouge, par exemple, le T piéton n’a pas été accompagné par les aménagements idoines. Ouverte en 2019, la prolongation du premier tronçon du tram 17 entre Moëllesulaz et le parc Montessuit a déjà démontré la force d’une telle infrastructure. Ce mode de transport a été adopté comme un moyen de se déplacer à l’intérieur même des trois communes urbaines qu’il traverse : Gaillard, Ambilly et Annemasse. Depuis son lancement, la ligne qui place Genève en 25 minutes est empruntée par plus de 11 000 voyageurs journaliers. L’arrêt Parc- Montessuit est ainsi devenu le deuxième arrêt le plus fréquenté sur l’ensemble de la ligne Suisse-France, selon Annemasse Agglo, qui a dédié un site Internet ad hoc pour accompagner le chantier en cours.
Un projet régional
Comme pour le CEVA, la ligne RER lancée entre Annemasse et la gare des Eaux-Vives, la prolongation du tram 17 jusqu’au quartier populaire du Perrier a lieu sous les auspices du Grand Genève. Coût du projet ? 63 millions d’euros. Il est soutenu par la Confédération à hauteur d’environ 12,3 millions de francs suisses. Le département de la Haute-Savoie investit plus de 17,5 millions d’euros. L’État apporte quatre millions d’euros. Comme à Genève au moment du retour des trams, poussé par l’ancien conseiller d’État Robert Cramer, le tram à Annemasse sert à urbaniser un espace où la voiture jouait un rôle prépondérant. “Le prolongement du tram va redessiner le coeur de l’agglomération, tout comme le projet piétonnisation du centre-ville porté par la ville d’Annemasse. Ces deux projets structurants visent les mêmes objectifs : proposer une mobilité plus apaisée, améliorer la qualité de l’air, offrir des lieux de vie plus agréables aux habitants et favoriser l’attractivité des commerces du centre-ville d’Annemasse”, avance l’Agglo. Tram, Léman Express, Voie verte, bus rapides, le pôle urbain frontalier agit sur sa mobilité. C’est la proximité avec Genève qui justifie et permet une telle infrastructure. “En France, aucun tram ne serait construit dans une ville de 40 000 habitants comme l’est Annemasse”, conclut Benoît Tognazzi, le chef de projet de ce chantier. La mise en service est prévue au printemps 2026, après une période d’essais de deux mois.

La poste d’Annemasse et sa place. C’est la première intersection qui sera traversée par le tram 17 après le terminus actuel, celui du parc Montessuit. Les lieux accueilleront des arbres sur une place entièrement piétonne. Les travaux se déroulent à partir du quartier du Perrier, futur terminus de la ligne, où, mi-mars, les rails avaient déjà été posés. Le tracé de l’ancien tram historique passait lui devant la mairie d’Annemasse.

Sur la rue des Voirons, le passage du futur tram entraîne une valorisation du bâti. Rénové et surélevé, cet ancien immeuble verra sa valeur augmenter. Les habitants seront logés dans une rue plus calme et agréable, dotée de petits commerces. Ces derniers ont eu accès à un pôle d’indemnisation géré par une commission ad hoc, indique Benoît Tognazzi, chef de projet.

Plusieurs rues perpendiculaires aux rails du tram bénéficient d’une transformation en zone piétonne. Ici, la rue René-Blanc.

Les travaux ont nécessité une refonte complète des sous-sols. Les canalisations ont été déplacées sur le bord des rues, de façon à rester accessibles après la pose des rails. Et les réseaux ont été modernisés en 2024. Sur l’image, les tuyaux noirs servent à la gestion du flux des tramways. En ville, une partie du tracé sera accessible aux voitures. Ce sera le cas sur la rue du Faucigny, entre la place de l’Étoile et l’avenue Jules- Ferry, où une voie sera maintenue.

La rue du Commerce rendue piétonne.

Le tram 17 est réalisé suivant une métrique suisse : 1 mètre d’écartement contre 1,40 m en France, ce qui a demandé aux équipes de s’adapter, souligne Benoît Tognazzi, chef de projet. Ici, la partie rectiligne du tronçon située entre le centre d’Annemasse et le dernier arrêt du 17 situé à proximité du quartier du Perrier. Le tram roulera à une vitesse maximum de 30 km/h entre des arrêts espacés de 500 mètres. Avec un service toutes les 6 minutes. Sur cette section, avenue de Verdun, les voies seront engazonnées, comme c’est le cas au début du tracé du tram 15 en direction de la ZIPLO, sur la commune de Lancy.

L’avenue de Verdun durant la cérémonie de la soudure du premier rail. Le chantier avait démarré en septembre 2023.

L’Agglo d’Annemasse a mis en place tous les deux mois une série de séances d’information – “les apéros Tram- Piétonnisation” – pour expliquer aux habitants la nature et la durée des travaux, ainsi que le projet dans son ensemble. “Les gens ont profité de ces rencontres pour évoquer d’autres questions, comme l’insécurité ou le nettoyage des rues”, témoigne Benoît Tognazzi. Les amémagements liés au tram et à la piétonnisation ont pourtant débouché sur la suppression de places de parking. Sur l’image, le futur et dernier arrêt du tram 17, Annemasse Perrier-Aubrac, qui desservira aussi le nouvel écoquartier de Château Rouge. Un P+R de 200 places est prévu à cet endroit. Un bus à haut niveau de service desservira la vallée de l’Arve.
Article tiré
du N°
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